Synthèse
Au cours de la 28e session ordinaire de son Assemblée qui s’est tenue en janvier 2017, l’Union africaine a adopté la Feuille de route principale de l’Union africaine (UA) sur les étapes pratiques pour faire taire les armes en Afrique d’ici 2020 (Feuille de route de l’UA) (UA, 2016). La Feuille de route de l’UA comprend un certain nombre de mesures pratiques et de modalités d’actions pour lutter contre les causes sous-jacentes des conflits et contre les instruments et vecteurs de la violence. La prévention des flux d’armes illicites qui circulent sur le continent et vers les zones de conflit constitue l’un de ses axes clés.
Pour mettre à la disposition des organes délibérants et des États membres de l’UA des analyses exhaustives et à jour, la Commission de l’UA a, en partenariat avec le Small Arms Survey, entrepris de réaliser une cartographie régionale des flux d’armes illicites.
Ce rapport propose une synthèse des informations recueillies à ce sujet auprès des États membres de l’UA, des communautés économiques régionales (CER), des entités régionales dotées d’un mandat relatif aux armes légères (ER) et des organisations de la société civile spécialistes de ce sujet. L’objectif des auteurs est de contribuer à l’identification des tendances et logiques propres à la prolifération des armes légères illicites en Afrique, mais aussi des lacunes qui doivent encore être comblées dans les politiques et les connaissances connexes.
Principales conclusions
Les États membres de l’UA considèrent que le principal flux illicite auquel ils sont confrontés est le trafic transfrontalier terrestre d’armes et de munitions. Les groupes armés, dont les organisations terroristes, ont fait la preuve de leur capacité à déplacer des armes et à mener des assauts par-delà les frontières.
- Le stock d’armes illicites présentes en Afrique est essentiellement composé de modèles et marques anciennes – datant principalement de la période de la guerre froide. Mais le fait que des modèles récents de provenances diverses aient été saisis indique que les acteurs armés et criminels du continent s’approvisionnent en armes légères auprès de sources nouvelles ou émergentes.
Parmi les sources externes d’approvisionnement en armes légères, on peut évoquer les transferts en provenance du Moyen-Orient et d’Europe de l’Est effectués en violation des embargos, le commerce des armes factices aisément convertibles et les détournements d’armes et de munitions récemment importées dans les règles. Une partie de ce matériel est détournée vers des groupes armés très peu de temps après son arrivée sur le sol africain.
Parmi les sources régionales d’armes illicites, on peut citer le trafic transfrontalier d’armes déjà illégales ; les détournements de matériel des stocks nationaux – et des forces de maintien de la paix – et d’armes détenues par la population civile suite à des vols, des pertes ou des pratiques de corruption ; et la production d’armes artisanales. Sur le continent, les armes à feu artisanales peuvent aussi bien être des pistolets rudimentaires que des fusils de chasse ou des armes sophistiquées de type fusil d’assaut.
Les données sur les armes illicites sont rares. On peut donc, au mieux, proposer une estimation grossière de l’ampleur actuelle du phénomène. Celui-ci est toutefois mieux connu dans certains pays qui se sont lancés dans des évaluations d’envergure nationale fondées sur de multiples sources d’information et méthodes de recueil des données.
Comme en témoignent la Feuille de route de l’UA et les conventions sous-régionales portant sur ce thème, les États membres de l’UA ont montré leur ferme volonté politique de lutter contre le fléau que sont les flux d’armes illicites. Les mesures pratiques identifiées dans la Feuille de route de l’UA – notamment le renforcement de la capacité des États à gérer les stocks, à conserver les données, et à procéder au traçage et à l’élimination des armes illicites – pourront indéniablement contribuer à la lutte contre les flux d’armes illicites. Mais il conviendra de lever les obstacles que constituent la hiérarchisation, la coordination et la mise en œuvre de ces engagements et initiatives.
Jusqu’à présent, les États membres de l’UA ne se sont que peu impliqués dans les plateformes d’échange d’information, lesquels sont une source de renseignements cruciaux sur le trafic d’armes. En communiquant davantage d’informations à ces plateformes, ils pourraient permettre au continent tout entier de disposer de données à jour et utilisables sur les tendances nouvelles qui caractérisent le trafic des armes à feu illicites.
Des mesures novatrices ont été prises sur le continent africain, notamment dans les domaines de la collecte des armes en situation de conflit (ou d’après-conflit), des initiatives de coopération transfrontalières et du contrôle de l’utilisateur final. Il conviendrait de les diffuser et d’en extraire des directives pratiques.